www.l-air-du-temps-de-chantal.com

L'AIR DU TEMPS

le Progrès du jeudi 24 mars 2016

 

 

Après les attentats qui ont fait au moins 31 morts, la traque a permis d'identifier les auteurs et d'établir le lien avec l'attaque du 13 novembre. A Bruxelles, le même réseau djihadiste qu'à Paris. Trois des quatre terroristes qui ont semé la mort à l'aéroport et dans le métro de Bruxelles ont été identifiés. Ils étaient directement impliqués dans les attentats de Paris, le 13 novembre dernier.

 

 

 

Perquisition fructueuse

 

Plusieurs perquisitions ont été effectuées après les attentats de Bruxelles. L'une d'elles, à Schaerbeek d'où les trois djihadistes ont pris un taxi pour l'aéroport, a permis de retrouver un atelier de fabrication de bombes : 15 kilos d'explosifs de type TATP, 150 litres d'acétone, 30 litres d'eau oxygénée, des détonateurs, des ventilateurs et une valise remplie de clous et de vis...

 

 

Dans une poubelle sur le trottoir, les enquêteurs ont retrouvé un ordinateur contenant un message "testament" d'Ibrahim El Bakraoui. Le terroriste y est particulièrement confus. Il affirme être dans la "précipitation", ne plus savoir quoi faire", se sait "recherché partout" et craint de se retrouver en cellule "à côté de lui". Ce "lui" n'étant autre que Salah Abdeslam. Visiblement, la capture du dernier membre des commandos de Paris, vendredi, a donné un coup de pied dans la fourmilière djihadiste.

 

 

 

Précipitation

 

Les islamistes ont-ils avancé leur attentat de peur d'être dénoncés par Abdeslam avant de pouvoir passer à l'acte ? La présence de 15 kilos de TATP dans l'appartement de Schaerbeek peut le laisser penser. S'agit-il des deux valises que Laachraoui, Ibrahim Bakraoui et leur complice n'ont pas pu charger dans le taxi, faute de place ? Cet incident témoigne en tout cas d'une précipitation certaine, tout comme la non-explosion de la troisième bombe à l'aéroport. Comme si les auteurs étaient passés à l'acte à toute vitesse, après avoir patiemment préparé leurs crimes depuis des mois. Patrick Fluckiger

 

 

 

 

 

ENQUETE - Radicalisation. Le renseignement saturé d'informations. Les services de renseignement sont débordés par les signalements de radicalisations, et la multiplication de petites cellules sur tout le territoire. Septembre 2015-2016, dans la salle des profs d'un collège de banlieue Nord de Paris. Mathilde, prof de sciences depuis un an dans l'établissement classé en réseau éducation prioritaire interroge sa collègue d'histoire-géo en poste depuis six ans : "J'ai été conspuée par des élèves quand j'ai expliqué l'évolution des espèces. Ils me répondaient c'est faux madame, le prophète, il dit comment le monde a été créé et c'est pas comme vous expliquez". L'aînée lui répond, blasée : "Il y a des sujets qu'il vaut mieux ne pas aborder en cours".

 

 

 

Guerre civile

 

Cette anecdote n'étonne pas Gilles Kepel, chercheur spécialiste de l'islam et du monde arabe contemporain (Auteur de Terreur sur l'Hexagone. 2005-2015, genèse du djihad français - Gallimard) qui a étudié sur le terrain la diffusion d'un islam radical en banlieue  "Il y a 20 ans, cela ne se serait pas produit. C'est révélateur de la démission face au phénomène et de la façon de propager des idées radicales de l'islam. Le djihadisme des années 2005-2020, celui de la troisième génération, fonctionne comme l'économie numérique de la Silicon Valley : en essaim.

 

 

Le GIA algérien et Al-Qaïda étaient des systèmes pyramidaux, militaires avec des chefs, des sous-chefs, de l'intendance. Les cellules de Daech ont émergé dans les prisons comme celle des Kouachi-Coulibaly (auteurs des attentats de janvier 2015), en marge des mosquées comme le groupe de Merah à Toulouse, à travers la petite délinquance, parfois même dans une bande de copains". Exemple criant, Lunel, gros bourg de 26 000 habitants entre Alès et Montpellier, où 16 jeunes amis d'enfance ont filé en Syrie. Radicalisés ensemble par un imam salafiste et mis en contact avec d'autres cellules et la Syrie sur internet. Cette radicalisation par capillarité s'étend plus vite, s'immerge dans des quartiers de villes de toute taille rongés par le chômage et les discriminations et déroute les services de renseignements habitués à suivre des filières classiques.

 

 

 

Noyés sous les signalements

 

Le sénateur Philippe Bas (LR) qui a auditionné cadres et policiers de base de la Direction centre du renseignement intérieur avoue avoir rencontré "des spécialistes très professionnels, très motivés mais proches de la saturation. Ils sont noyés par les informations qu'ils reçoivent : les risques d'attentats, les signalement de radicalisation et de velléités de départs en Syrie, les retours de djihadistes (236 sur 609 recensés sur place). "Autant d'informations à stocker, recouper, vérifier. Depuis la Syrie, Daech multiplie fausses rumeurs et fausses pistes afin d'épuiser et déboussoler les policiers. Les frères Clain, ces convertis proches de Mohamed Merah qui ont revendiqué les attentats du 13 novembre seraient souvent à la manoeuvre pour la France et la Belgique. "Si on neutralisait les brigades francophones là-bas, cela nous donnerait un sacré coup de main", ont raconté les policiers auditionnés. Gilles Kepel partage cet avis : "Tant que le socle tient en Irak et en Syrie, les djihadistes en Europe restent motivés et cherchent à essaimer".

 

 

 

Accélération

 

Les signalements oraux de personnes susceptibles d'être mentionnées sur un fiche S pour risque terroriste ont augmenté de 155 % en 2015. "Pour moitié, c'est parce que certains se réveillent notamment dans les quartiers à forte population musulmane et n'ont plus peur de dénoncer des individus qu'ils estiment radicalisés : ça c'est la bonne nouvelle. Pour moitié hélas, c'est lié à une accélération du phénomène et c'est la mauvaise nouvelle", avoue un policier auditionné par la commission parlementaire.

 

 

Les résultats ? Pas moins de 600 opérations pour près de 300 interpellations depuis trois mois. La progression est rapide. Autant que le phénomène ? Les propos du ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve apportent un début de réponse : "La menace terroriste est sans doute encore plus importante qu'avant le 13 novembre". Pascal Jalabert

 



25/03/2016
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 59 autres membres