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L'AIR DU TEMPS

le Progrès du mercredi 27 juillet 2016

 

 

TERRORISME - "TUER UN PRÊTRE, C'EST PROFANER LA RÉPUBLIQUE" À DÉCLARÉ HIER FRANÇOIS HOLLANDE

 

 

Un abbé égorgé : nouveau cap dans l'horreur

 

 

Deux semaines après le carnage de Nice, c'est une église catholique qui a été attaquée hier dans la banlieue de Rouen. Une cible préconisée depuis longtemps par l'organisation État islamique, qui a revendiqué l'attentat.

 

 

 

C'

est la 236e victime du terrorisme sur le sol français depuis Charlie Hebdo, en janvier 2015, mais c'est la première fois qu'une attaque se produit dans un lieu de culte catholique. Jacques Hamel, prêtre auxiliaire, a été égorgé hier matin alors qu'il célébrait la messe dans son église de Saint-Étienne-du-Rouvray (Seine-Maritime). Âgé de 86 ans dont un demi-siècle de diocèse, il était "chaleureux, simple et vivant modestement", selon les paroissiens.

 

 

Cinq autre fidèles, trois religieuses et un couple de paroissiens, avaient été pris en otage après l'irruption de deux hommes vers 9 h 30. L'un des paroissiens, âgé lui aussi de 86 ans, a été touché au thorax mais sa vie n'est pas en danger. Une religieuse a réussi à s'échapper et à prévenir la police. La Brigade de recherche et d'intervention (BRI) de Rouen a abattu les deux hommes alors qu'ils se jetaient sur eux en criant "Allaha Akbar" en quittant l'édifice religieux. Selon le procureur, les deux assaillants étaient équipés de trois couteaux mais aussi  de "faux engins explosifs" et d'une arme de poing - une arme "inopérante". Ils auraient filmé la scène, selon l'une des religieuses qui a réussi  à s'échapper.

 

 

 

Pourquoi une église ?

 

Cibler les églises chrétiennes s'inscrit dans "l'objectif fondamental de Daech de déclencher une spirale de violence inter-communautaire en France et dans les pays voisins, en suscitant par des provocations terroristes, des représailles aveugles contre les population musulmanes", décrivait déjà en 2015 Jean-Pierre Filiu, spécialiste de la Syrie, après la tentative d'attaque à Villejuif . Ce "clash" des civilisations et des religions a même été théorisé par l'Égyptien Sayyid Qutb, maître à penser de l'islam radical et membres des Frères musulmans, pendu en Égypte en 1966. Il y a un an, la revue Dar al-Islam, magazine de propagande de Daech, rappelait que les églises faisaient partie des cibles privilégiées : "Il faut installer la peur dans les coeur".

 

 

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Qui étaient les deux terroristes ?

 

L'un des deux, Adel Kermiche, 19 ans, était fiché S, mais "jamais condamné" a précisé hier soir le procureur de Paris, François Molins. À deux reprises, dont une fois encore mineur, il avait tenté de rejoindre la Syrie. Il avait été intercepté en Turquie en mai 2015. Après 10 mois de détention provisoire, il avait été libéré le 22 mars 2016 et assigné à résidence avec bracelet électronique dans l'attente d'un procès pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste". Il avait le droit de sortir de chez lui entre 8 h 30 et 12 h 30. Le parquet anti-terroriste de Paris avait fait appel de cette libération sans obtenir gain de cause. L'autre terroriste est en cours d'identification. Un troisième, mineur et frère cadet d'un djihadiste en Syrie, qui rodait autour de l'église, a été interpellé.

 

 

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Pourquoi une revendication de Daech aussi rapide ?

 

Jamais dans les attentats en Europe, Daech n'avait "revendiqué aussi vite" ont noté hier certains spécialistes. Moins de quatre heures ont suffi pour que l'agence Amaq de Daech loue l'opération des "soldats de l'État islamique en réponse aux appels de cibler les pays croisés de la coalition". Sans doute parce que cet assassinat d'un prêtre correspond exactement aux cibles et au mode opératoire préconisés par l'EI. Les deux terroristes ont-ils répondu à un appel venant directement de Syrie ? Selon la chaîne américaine CNN, qui cite une source de renseignements français, le terroriste connaissait le djihadiste Maxime Hauchard, identifié comme un exécuteur de Daech en Syrie. Et hier soir, selon David Thomson, spécialiste du djihadisme, "un Français converti de l'EI, originaire de Saint-Etienne-du-Rouvray, se félicitait de l'attentat sur les réseaux sociaux". Xavier Frère

 

 

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LUTTE CONTRE LE TERRORISME : "TOUS LES MOYENS", MAIS LESQUELS ?

 

 

"Respect du droit", affirme François Hollande. "Assez d'arguties juridiques", répond Nicolas Sarkozy. Le débat s'est enflammé hier sur la manière de lutter contre le terrorisme.

 

 

 

"S

oyons ensemble des derniers à pleurer,et soyons ensemble les derniers à être debout contre la barbarie et dans le respect de tous"... Le maire communiste de Saint-Étienne-du-Rouvray, saluant la mémoire du prêtre catholique, aurait pu donner le ton du deuil. Il n'en a rien été.Moins de deux semaines après la tuerie de Nice, qui a allumé la polémique sur les dispositifs de sécurité, l'attentat d'hier a provoqué des échanges très vifs entre le pouvoir et l'opposition. C'est cette fois le profil d'un des deux meurtriers qui alimente la polémique : mis en examen pour fait de terrorisme, il avait été libéré sous bracelet électronique.

 

 

Le Pen : "révoltant !"

 

Dès lors s'opposent deux choix politiques : François Hollande appelle à "faire la guerre par tous les moyens" contre Daech, mais "dans le respect du droit" ; Nicolas Sarkozy (LR) fustige "les arguties juridiques, les précautions, les prétextes à une action incomplète (qui) ne sont pas admissibles".

 

 

La plus virulente a été Marine Le Pen (FN), qui a renvoyé dos à dos droite et gauche : "La responsabilité de tous ceux qui nous gouvernent depuis 30 ans est immense. Les voir bavarder est révoltant ! #SaintEtienneDuRouvray", a tweeté la dirigeante d'extrême droite. Nicolas Sarkozy réclame du pouvoir qu'il mette en oeuvre "toutes les propositions que nous avons présentées depuis des mois". Et François Fillon (LR) dénonce avec lui : "Un homme qui a tenté de partir combattre aux côtés de Daech en Syrie ne devrait pas être en liberté, même avec un bracelet électronique".

 

 

Une proposition de loi était déjà en préparation pour l'automne, sous la houlette du patron des députés LR Christian Jacob, un proche de l'ancien président. Parmi les mesures envisagées : les centres de rétention pour les individus "radicalisés", la rétention de sûreté pour les personnes condamnées pour un crime terroriste, et la création d'un "délit de séjour" pour toute personne qui se trouve sur un théâtre terroriste à l'étranger.

 

 

 

Après la déchéance

 

Elles avaient un temps été reprises par François Hollande : c'était après l'attentat du Bataclan du 13 novembre, qui l'avait amené aussi à proposer la déchéance de nationalité, finalement abandonnée devant l'absence de majorité. Mais le Conseil d'État avait rejeté les propositions du parti Les Républicains, jugées "inconstitutionnelles", ou d'emblée limité leur effet par des garde-fous juridiques - ces "arguties" dénoncées maintenant par Nicolas Sarkozy.

 

 

François Hollande a choisi, en réponse, de camper sur l'appel à l'unité et au droit. "Tuer un prêtre, c'est profaner la République, qui garantit la liberté de conscience, a-t-il déclaré hier soir, lors d'une allocution depuis l'Élysée. C'est semer l'effroi, car ce que veulent les terroristes, c'est nous diviser, nous séparer, nous déchirer". Et d'insister, en réponse directe aux demandes de la droite : "Restreindre nos libertés, déroger à nos règles constitutionnelles n'apporterait pas d'efficacité à notre lutte contre le terrorisme et affaiblirait à coup sûr la cohésion nécessaire à notre Nation". F.B.

 



27/07/2016
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