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L'AIR DU TEMPS

Franceinfo -

 

 

Visite d'Emmanuel Macron en Serbie : les cinq points de crispation entre Paris et Belgrade

 

 

 

 

Les relations entre les deux pays sont fraîches en raison de nombreux points de divergence sur l'Union européenne et le Kosovo

 

 

 

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Emmanuel Macron et le président serbe, Aleksandar Vucic, à l'Elysée, le 12 décembre 2017 à Paris. (ALAIN JOCARD / AFP)

 

 

 

Dix-huit ans que ce n'était plus arrivé. Aucun président français ne s'était rendu en Serbie depuis Jacques Chirac en 2001. Le voyage d'Emmanuel Macron, lundi 15 et mardi 16 juillet, est donc très attendu et se déroulera dans un contexte délicat en raison des désaccords qui sapent les relations diplomatiques entre les deux pays. Ce sera notamment l'occasion de réparer un impair, car la visite initialement prévue en décembre 2018 avait finalement été reportée en raison de la crise des "gilets jaunes".

 

 

Le président français doit notamment inaugurer un monument dédié à l'amitié franco-serbe dans un parc du centre de la capitale, dont l'inscription "Aimons la France comme elle nous a aimés" avait été maculée de peinture noire en novembre dernier. Selon le président serbe, Aleksandar Vucic, "l'importance de la visite (d'Emmanuel Macron) est énorme, nous allons nous entretenir de thèmes économiques et politiques, de la voie européenne de la Serbie et certainement du Kosovo".

 

 

Franceinfo revient sur les cinq points de crispation entre les deux pays.

 

 

 

1 - Dialogue à l'arrêt sur les relations entre la Serbie et le Kosovo

L'un des thèmes principaux devrait être celui des relations avec le Kosovo, ex-province serbe à majorité albanaise devenue indépendante en 2008, sans que Belgrade ni Moscou ne reconnaissent cette souveraineté. Les tensions se sont accrues avec l'application par le Kosovo fin 2018 de droits de douanes à hauteur de 100% sur les produits serbes.

 

 

Le dialogue sur la normalisation des relations entre la Serbie et le Kosovo, mené sous l'égide de l'Union européenne, est ainsi bloqué depuis des mois. A la suite des efforts d'Emmanuel Macron et de la chancelière allemande, Angela Merkel, Belgrade et Pristina avaient accepté, le 30 avril, de reprendre leurs pourparlers et une nouvelle rencontre était prévue début juillet à Paris. Mais celle-ci a été reportée, aucun progrès n'étant en vue. "Ce sommet aura lieu quand les conditions seront réunies", affirme l'Elysée, qui réclame une reprise du dialogue. La possibilité de tenter de régler le conflit par un échange de territoires reste en suspens. Paris y est ouvert.

 

 

 

2 - Paris temporise sur l'adhésion serbe à l'UE

Lors des difficiles tractations menées à Bruxelles pour nommer des personnalités aux postes clés de l'UE, début juillet, Emmanuel Macron s'est opposé à "toute forme d'élargissement" avant une "réforme en profondeur de notre fonctionnement institutionnel". Cette phrase a sans doute contrarié les autorités serbes, alors que le pays a déposé une candidature d'adhésion en 2009. Le "président de la République soutient la perspective européenne des Balkans, mais a dit également que cette adhésion aura lieu quand l'UE se sera préalablement reformée, ce qui est très bien compris par les Serbes", a assuré l'Elysée.

 

 

L'an passé, déjà, Emmanuel Macron avait averti la Serbie que ce pays n'entrerait pas "automatiquement" dans l'UE en 2025, une date évoquée pour son adhésion. Lors de la même conférence de presse à Paris, le président serbe, Aleksandar Vucic, avait fait preuve de bonne volonté : "Nous ne pourrons pas adhérer avant de régler la question avec Pristina, avant de réformer notre système judiciaire, de régler les questions de l'Etat de droit et tout le reste."

 

 

L'eurodéputée LREM Nathalie Loiseau, pour sa part, a plaidé lundi matin sur franceinfo pour "un partenariat très étroit sur le plan économique, sur le plan des infrastructures, mais aussi sur le plan politique pour éviter toutes les tensions qui existent dans cette région". Elle estime cependant, comme le chef de l'Etat, que l'entrée de la Serbie dans l'UE n'est pas pour tout de suite.

 

 

[Les Balkans] sont au cœur géographique, historique et culturel de l'Europe, simplement ils ne sont pas du tout prêts [à entrer dans l'Union européenne] et nous ne sommes pas du tout prêts à les accueillir.Nathalie Loiseau, eurodéputée LREM à franceinfo

 

 

 

 

3 - La bourde protocolaire française lors du 11 novembre 2018

Paris et Belgrade doivent aussi surmonter le malaise créé par un loupé du protocole français lors de la cérémonie du 11 novembre 2018, qui a indigné la Serbie. Aleksandar Vucic avait été placé dans une tribune secondaire alors que Hashim Thaçi, président du Kosovo, était assis dans la tribune principale, avec Emmanuel Macron, Donald Trump et Vladimir Poutine.

 

 

"Vous pouvez imaginer comment je me sentais", avait alors déclaré le président serbe. "Il me semble que je regardais tout le temps le sol et l'écran, ne croyant pas ce que j'étais en train de voir devant moi et sachant le sacrifice fait par le peuple serbe durant la Première Guerre mondiale." "C’est une maladresse regrettable et je prie le président Vucic et le peuple serbe de nous excuser", avait alors déclaré à la télévision serbe l'ambassadeur français, Frédéric Mondoloni. Le monument célébrant l'amitié entre la France et la Serbie avait été vandalisé à Belgrade quelques heures après les cérémonies.

 

 

 

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Un monument célébrant l'amitié entre la Serbie et la France avait été barré de noir quelques heures après la cérémonie du 11-Novembre 2018 sur les Champs Elysées. Le président serbe avait été placé dans une tribune secondaire alors que Hashim Thaçi, président du Kosovo, était assis dans la tribune principale. (VLADIMIR ZIVOJINOVIC / AFP)
 

 

 

4 - Le refus français d'extrader le Premier ministre kosovar

Un autre différend, toujours en lien avec le Kosovo, oppose les deux pays. En avril 2017, la justice française avait refusé de livrer à Belgrade Ramush Haradinaj, actuel Premier ministre kosovar, réclamé par la justice serbe qui l'accuse de crimes de guerre durant le conflit du Kosovo en 1998 et 1999. Ramush Haradinaj avait été arrêté en France à l'aéroport de Bâle-Mulhouse et présenté au parquet de Mulhouse, pour que la demande d'extradition présentée par Belgrade soit examinée par la chambre de l'instruction. La justice avait finalement rejeté la demande serbe et levé le contrôle judiciaire. 

 

 

Belgrade affirme que Ramush Haradinaj a été à la tête d'une unité – les "Aigles noirs" – accusée d'avoir torturé et assassiné des dizaines de civils serbes dont les corps ont été découverts près du lac Radonjic, dans la région de Decani. 

 

 

 

5 - Peu d'échanges économiques dans cette région convoitée par la Chine

Le désamour relatif entre les deux pays s'accompagne également d'une faiblesse des liens économiques, même si le groupe Vinci a récemment remporté la concession de l'aéroport de Belgrade et qu'Alstom reste en lice pour le projet de métro de la capitale serbe. Le groupe français, dont les dirigeants feront partie de la délégation française, est désormais en concurrence avec un consortium chinois.

 

 

Les Balkans sont une pièce importante des "nouvelles routes de la soie", méga-projet de la Chine pour développer sa puissance économique mondiale. A Smederevo, à l'est de Belgrade, la plus grosse usine sidérurgique de Serbie a été rachetée par le chinois HBIS. En août 2018, le groupe minier chinois Zijin a repris 63% du conglomérat serbe de cuivre RTB Bor et promis d'investir dans la plus grande mine de cuivre du pays. Entre 2007 et 2017, Pékin a annoncé un total de 12 milliards d'euros de prêts dans les pays de la région, dont un tiers pour la Serbie.

 



15/07/2019
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