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L'AIR DU TEMPS

le Progrès du mardi 18 octobre 2016

 

 

 

LA TROISIÈME VILLE D'IRAK EST OCCUPÉE DEPUIS 2014 PAR LES DJIHADISTES QUI Y DÉTIENNENT LEUR TRÉSOR DE GUERRE

 

 

 

Pourquoi la bataille de Mossoul est décisive

 

 

La grande offensive de la coalition a été lancée contre la deuxième grande ville du territoire contrôlé par Daech en Irak. Mais les intérêts contradictoires des forces en présence pourraient retarder la victoire.

 

 

 

E

st-ce la lutte finale ? Celle qui annonce irrésistiblement le déclin de Daech et son califat à cheval sur deux pays, l'Irak et la Syrie ? La prise de Mossoul s'annonce en tout cas comme une bataille décisive, d'abord dans la reconquête par les Irakiens de leur territoire, puis dans la stratégie de la coalition de chasser Daech des villes.

 

 

L'État-major irakien a annoncé il y a un an que Mossoul, prise par les djihadistes en juin 2014, était LA priorité de 2016. "Le temps de la victoire est venu et les opérations pour libérer Mossoul ont commencé", a annoncé dimanche soir le Premier ministre irakien, Haider Al-Abadi. C'est la plus grande bataille sur le sol irakien depuis 2003 et l'invasion de l'Irak par l'armée américaine.

 

 

 

Quelles forces en présence ?

 

 

Daech avait réussi à prendre Mossoul en 2014 avec seulement 500 combattants. L'organisation terroriste compte aujourd'hui environ 4 500 hommes dans cette ville de 1,5 million d'habitants.

 

 

Face à elle, un assemblage hétéroclite de 50 000 soldats aux intérêts contradictoires : forces irakiennes, peshmergas kurdes, milices chiites soutenues par l'Iran, présence turque, et Occidentaux : 5 000 Américains et 500 Français aux côtés des peshmergas et des troupes irakiennes positionnés à 60 km au sud de Mossoul, sur la base de Qayyarah. Les Turcs sont au nord, et les Kurdes à l'ouest. "Seules l'armée et la police irakienne doivent entrer dans Mossoul", a annoncé le Premier ministre. Pas certain que ce plan soit appliqué à la lettre.

 

 

 

Que représente Mossoul pour Daech ?

 

 

C'est la deuxième grande ville, là même où son chef al-Baghdadi a proclamé le califat en 2014. C'est dire sa portée symbolique.

 

 

Frédéric Pichon, géopolitologue, spécialiste du Moyen-Orient joint hier : "Daech s'est installé facilement, s'est installé grâce à l'appui de tribus sunnites déjà pré-existantes dans la ville. Il n'est pas exclu que ces tribus rebasculent, se retournent contre les djihadistes si jamais une vraie négociation se décide avec l'État irakien, sur fond d'argent évidemment".

 

 

 

Qui va tirer profit de la défaite de Daech ?

 

 

"Sur la dépouille de l'État islamique, va se dérouler une surenchère entre les acteurs de la région", a d'ores et déjà anticipé Régis Le Sommier, auteur de "Daech l'historie". Tous les acteurs de l'offensive, qui sera forcément terrestre à un moment donné, ont des intérêts divergents. "Cela prendra beaucoup de temps, estime Frédéric Pichon, avec beaucoup de questions non réglées : la présence des Turcs après trois ans de laxisme, la volonté des Kurdes, le sort des sunnites en Irak..." On peut y ajouter l'ombre des Iraniens, l'absence (masquée ?) de l'Arabie saoudite.

 

 

Vaincre l'ennemi commun Daech est une chose, préparer l'après victoire en est une autre. Sans compter les possibles dommages collatéraux, comme des victimes civiles. "On va nous vendre une guerre propre, mais elle ne peut jamais l'être, assure encore Frédéric Pichon. La guerre ne peut pas être autre chose que brutale ou inhumaine, d'autant que Mossoul est une zone urbaine et dense". X.F.

 

 

 

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Le risque d'une nouvelle crise humanitaire

 

 

Après Alep, la communauté internationale et les ONG craignent une autre crise humanitaire de grande ampleur à Mossoul. Le représentant du Haut-commissariat aux réfugiés (HCR) en Irak a prévenu que l'offensive lancée pour reprendre la ville aux djihadistes risque d'entraîner une exode de la population. Au moins 700 000 habitants de la deuxième ville irakienne et des ses environs vont avoir besoin d'une aide urgente et d'abris.

 

 

Près d'un million d'Irakiens pourraient être déplacés par les combats pour la reconquête de Mossoul. Le Haut Commissariat des nations unies pour les réfugiés (HCR) a installé 11 camps prêts à accueillir environ 120 000 déplacés. Près de 300 000 places sont disponibles dans d'autres camps gérés par le gouvernement et des ONG.

 

 

 

 

 

Général Dominique Trinquand - Ancien chef de mission militaire auprès de l'ONU et de l'OTAN

 

 

 

"Le combat se gagnera au sol"

 

 

 

 

Doit-on s'attendre à la "bataille finale" de Mossoul ?

 

Oui, certainement. Mossoul doit tomber et tombera, ça ne fait aucun doute. Cela prendra du temps, mais tout dépend de la volonté des djihadistes de combattre ou pas dans la ville. Cette victoire signifierait la fin du califat "global", mais une fois que le territoire est perdu, le mythe du califat est tombé. Ce serait un grand tournant deux ans après l'établissement du califat par al-Baghdadi, avec des velléités territoriales. Pour autant, ce n'est pas la fin de l'idéologie, ni probablement des combats, puisqu'un certain nombre de ces djihadistes extrémistes vont continuer le combat, ailleurs, en Libye, ou sur nos territoires.

 

 

 

Sur Mossoul, le rapport de forces est largement en défaveur de Daech

 

C'est totalement déséquilibré en faveur de la coalition : peshmergas kurdes, armée irakienne, soutien de la coalition. Le califat n'est pas en mesure de se défendre. Quelles pertes subira-t-il ? La coalition voudra au maximum limiter les dégâts.  Des précautions seront prises, ce qui peut allonger les délais de la prise de la ville.

 

 

 

On imagine que les combats au sol en ville, seront terribles...

 

Comme disait le général Bigeard, les combats "se termineront à la fourchette". C'est là que se dérouleront les affrontements les plus rudes, les plus difficiles, où il faut des combattants aguerris, et des capacités supérieures qui permettent de combattre la nuit, de repérer les pièges des djihadistes. Le combat se gagnera au sol, avec les Irakiens et les Kurdes notamment.

 

 

 

 

Quel rôle la France va-t-elle jouer dans cette bataille ?

 

Les forces spéciales ont déjà joué un rôle dans la formation, auprès des Peshmergas, de l'armée irakienne. La France a également joué un rôle dans la collecte de renseignements, grâce aux avions qu'elle a envoyés. Elle a également frappé des sites stratégiques. Elle va continuer cet appui aérien et d'artillerie intégrée dans le dispositif d'appui américain. Recueilli par Xavier Frère

 

 

 

 

 

 

 

 

REPÈRES

 

 

 

Mossoul, au coeur de toutes les batailles

 

 

■ 20 mars 2003 : les États-Unis envahissent l'Irak

 

 

■ Le 11 avril, Mossoul est occupée par les forces américaines et kurdes

 

 

■ 2004 : en novembre, une véritable bataille oppose à Mossoul les insurgés sunnites et l'armée américaine. Une lutte d'influence entre Kurdes et Arabes sunnites se joue pour le contrôle de la ville. En avril, les élections locales sont remportées par un parti sunnite nationaliste.

 

 

■ 2005 : le chiite Nouri Al Maliki est élu premier ministre en Irak

 

 

■ 2008 : entre septembre et octobre, la communauté chrétienne de Mossoul est la cible de violences faisant une dizaine de morts.  En mars, l'archevêque chaldéen de Mossoul, Mgr Faraj Rahho est kidnappé et assassiné.

 

 

■ 2009 : Mossoul reste un foyer de l'insurrection sunnite

 

 

■ 2011 : retrait des dernières troupes américaines d'Irak

 

 

■ 2014 : en juin, Daech aidé de sunnites irakiens s'empare de Mossoul, puis de l'ensemble de la province de Ninive, dont Mossoul est le chef-lieu.

 

 



18/10/2016
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