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L'AIR DU TEMPS

la tribune du vendredi 10 mars 2015

 

 

ARDECHE - Grotte Chauvet : c'est la chapelle sixtine de la préhistoire. L'espace de restitution est inauguré aujourd'hui à Vallon Pont d'Arc par François Hollande. Chef-d'oeuvre de l'art pariétal, la grotte Chauvet recèle les premières oeuvres d'art de l'humanité (- 36 000 ans). Une réplique, la Caverne du Pont d'Arc, peut désormais accueillir le monde entier.

 

 

 

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400 000 C'est le nombre de visiteurs attendus chaque année à l'espace de restitution. Comme les visites sont restreintes au sein même de la réplique, pas plus de 4 000 personnes pourront être accueillies chaque jour. "La restitution de la grotte Chauvet est bluffante de vérité. Je n'aurai jamais imaginé une telle réplique. C'est unique au monde". Jean Clottes, Préhistorien et président du comité

 

 

 

La plus grande réplique d'une grotte ornée au monde ouvrira ses portes le 25 avril en Ardèche. Jamais une grotte ornée n'a été restituée dans de telles proportions et avec une telle perfection.

 

 

 

Même des scientifiques se sont fait piéger. Jean Clottes s'en amuse encore ! Ce préhistorien a été le premier à expertiser et à authentifier la grotte Chauvet, le 29 décembre 1994 : "la réplique est vraiment fidèle à l'originale Il y a d'abord cette impression de grandeur. La qualité de la reproduction des dessins est exceptionnelle". Il a lui-même versé une larme en découvrant, pour la première fois, la réplique du panneau des chevaux.

 

 

 

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Mille signes et dessins

 

Il était tout de même impossible de reproduire intégralement le millier de signe et dessins de cette chapelle sixtine de l'art pariétal, classée par l'UNESCO au patrimoine mondial de l'humanité en juin dernier. Un "best of" des 8 500 m2 de galeries a été soigneusement sélectionné et compacté dans une rotonde de 3 000 m2, à Vallon-Pont-d'Arc. De grandes fresques des lions au crâne d'ours posé sur un rocher, en passant par de fabuleuses concrétions géologiques, rien n'a été oublié afin d'éblouir les visiteurs du monde entier.

 

 

 

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"Notre seule volonté a été de transmettre au public cette fabuleuse découverte", indique Pascal Terrasse, président du grand projet de la Caverne du Pont d'Arc. De géniaux faussaires ont phosphoré pour retrouver les gestes de nos ancêtres les Aurignaciens. Comment reproduire les dessins les plus anciens de l'humanité ? "Il faut d'abord bien comprendre ce que l'on voit : les mouvements, les détails... Sinon, la copie n'est pas parfaite", répond Gilles Tosello.

 

 

 

Le préhistorien artiste plasticien a planché sur les deux oeuvres monumentales que sont le panneau des chevaux et la fresque des lions, alors que l'atelier d'Alain Dalis s'est penché sur 25 autres panneaux. Pour Jean-Jack Queyranne, le président de la Région Rhône-Alpes, "toute l'histoire de l'art est dans la grotte Chauvet. Pour être à la hauteur de cette oeuvre magistrale, nous ne voulions surtout pas d'un parc d'attraction".

 

 

 

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Mission accomplie ! De subtils artifices ont été trouvés pour prolonger l'immersion. La température, l'humidité, les odeurs, le silence... chaque détail à compté. "Si nous n'avions pas réussi l'environnement naturel, nous n'aurions pas pu mettre en valeur les dessins", explique Fidèle Sola, directeur des travaux chez Campenon Bernard Régions. Un centre d'interprétation, dans la "Galerie de l'Aurignacien", complètera la visite pour mieux comprendre l'art pariétal et nos ancêtres. Robin Charbonnier

 

 

 

 

Un nouveau joyau pour le tourisme français

 

Le monde entier est attendu en Ardèche pour admirer la réplique de la grotte Chauvet. Alors que l'ouverture est programmée au 25 avril, de nombreux étrangers ont déjà réservé leur billet. Et pas seulement les Hollandais, les Belges et les Allemands, qui font presque partie du paysage. Des Japonais, des Chinois, Américains... sont aussi attendus. "Des amis du Nord-Ouest des Etats-Unis viennent exprès le 24 avril pour profiter de l'espace de restitution dès le premier jour d'ouverture", confie le préhistorien Jean Clottes.

 

 

C'est un véritable tournant pour les professionnels du tourisme ardéchois. "Pour la première fois, des Japonais m'ont appelé pour réserver", sourit un responsable de chambres d'hôtes. Si la fréquentation attendue à près de 400 000 visiteurs par an se confirme, des hébergements seront vite saturés lors de la période estivale.

 

 

 

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"Il manque des hôtels de très grand standing. C'est le chaînon manquant. Malgré nos démarches, aucune initiative ne s'est encore concrétisée. Mais des projets vont se réaliser dans les années à venir. On doit encore faire des efforts pour que l'Ardèche entre dans la cour des grands", souligne Gil Breysse, directeur de l'agence de développement touristique.

 

 

Et d'ajouter : "Depuis 2009-2010, plus de 100 millions d'euros ont été investis, chaque année, par les acteurs privés pour améliorer les équipements. Le classement de la grotte Chauvet au patrimoine mondial et l'ouverture de la réplique ont un effet indéniable sur le paysage touristique ardéchois". L'Ardèche mise sur la Caverne du Pont d'Arc pour augmenter la fréquentation touristique annuelle, estimée à 2,5 millions de visiteurs. Les professionnels savent aussi que la clientèle d'un tel équipement culturel peut avoir un portefeuille plus garni que la moyenne. R.C.

 

 

 

CHRONOLOGIE de l'art pariétal

 

 

- 75 000

 

Des hominidés gravent des croisillons (1er motifs géométriques) sur un bloc d'ocre, dans la grotte de Blombos -  Afrique du Sud

 

 

- 37 000

 

Des hommes occupent la grotte d'Altamira et y dessinent des symboles abstraits - Espagne

 

 

 

- 36 000

 

La grotte Chauvet, en Ardèche est ornée de 420 représentations d'animaux (peintures, gravures) - France

 

 

 

- 33 000

 

Des hommes sculptent une statuette en ivoire représentant une femme Vénus de Hohle Fels dans une grotte (près de Schelklingen) - Allemagne

 

 

 

- 29 000

 

Des pierres sont gravées dans l'Abri Cellier - France

 

 

 

- 25 000

 

Des hommes ornent la grotte Cosquer dans la calanque de la Triperie (Marseille) de mains négatives et de tracés digitaux - France

 

 

 

- 24 640

 

Des chevaux ponctués sont dessinés dans la grotte de Pech-Merle - France

 

 

 

- 23 000

 

Des hommes ornent la grotte du Pech-Merle de figures animales et mains négatives - France

 

 

 

- 17 000

 

Des hommes ornent la grotte Cosquer dans la calanque de la Triperie (Marseille) de signes et de peintures et gravures figuratives animales terrestres et marins (chevaux, bouquetins, phoques, etc) - France

 

 

 

- 17 000

 

Des hommes occupent la grotte d'Altamira et y dessinent des animaux polychrome - Espagne

 

 

 

- 15 000

 

Des hommes ornent la grotte de Lascaux de peintures et gravures animales (notamment aurochs et chevaux) - France

 

 

 

 

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Sur les pas de l'ours des cavernes

 

Pour s'immerger dans la cavité ornée, fermée au public, il faut ouvrir une prote de sous-marin, lourde de 650 kilos. Devant moi, une chatière dans laquelle il faut se faufiler. Celle qui a été empruntée par les trois découvreurs (Jean-Marie Chauvet, Eliette Brunel et Christian Hilaire) le 18 décembre 1994 (et élargie depuis). Chaque palier me fait prendre 1 000 ans. La vertigineuse descente de 36 marches résonne dans l'immense salle Brunel. Elle est inondée par le scintillement de concrétions d'une blancheur immaculée.

 

 

 

Sur la gauche, l'éboulement qui a scellé et protégé le trésor de l'humanité il y 21 500 ans. Le bruit des pas, sur les étroites passerelles métalliques de 60 centimètres de large, se mêlent aux clapotis des gouttes tombant à rythme régulier. Le cheminement d'un ours des cavernes se dessine sur le sol. La nature laisse même un chef-d'oeuvre inattendu avec ce crâne d'un plantigrade recouvert par la calcite.

 

 

 

Dans l'immense cathédrale, je traque le moindre indice laissé par les Aurignaciens. Prenant en pleine figure le génie des artistes qui ont légué plus de 1 000 dessins sur les parois. Le cheval gravé est à quelques centimètres de moi. Un bout d'argile ressort de la ligne dorsale de l'équidé. Avec cette impression que l'auteur a tracé de ses doigts l'oeuvre la veille. Je m'approche de la fresque des chevaux.

 

 

 

Certains semblent hennir au jeu de la frontale. Je m'accroupis pour franchir le seuil et plonger dans la salle du fond. Je passe à côté de mégacéros. Et, là, au bout des 335 mètres de passerelles, j'aperçois les quatorze lions courir après des bisons. Je reste en apnée devant la scène de chasse. Comme si le temps était suspendu pour toujours. R.C.

 

 

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11/04/2015
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