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L'AIR DU TEMPS

le Progrès du vendredi 2 septembre 2016

 

 

SOCIÉTÉ - LA FRACTURE SOCIALE S'EST CREUSÉE DEPUIS 10 ANS

 

 

Des classes moyennes  vraiment déclassées

 

 

Dix ans après avoir publié "Les Classes moyennes à la dérive", le sociologue Louis Chauvel lance un cri d'alarme" (Seuil) : la classe moyenne vit bel et bien un déclin.

 

 

 

P

ouvoir d'achat stagnant, impôts alourdis, niveau d'étude non reconnu, difficulté à constituer un patrimoine, inquiétude pour l'avenir des enfants, écarts de revenus grandissants avec les riches... La morosité envahit la classe moyenne, ces Français (50% à 65 % de la population) qui produisent, consomment, investissent, assurent la stabilité sociale du pays. Et choisissent les présidents de la République : ils sont les plus nombreux à voter, les plus indécis.

 

 

Dans le discours, la classe politique accorde donc beaucoup d'attention à cet hétéroclite France de salariés, indépendants ou retraités du public et du privé. Dans la réalité, les pouvoirs publics leur demandent toujours plus d'efforts depuis la fin des Trente Glorieuses. Et même davantage depuis la crise de 2008.

 

 

 

Une fiscalité en hausse

 

Entre les deux livres de Louis Chauvel (2006 et 2016), le ras-le-bol fiscal a nourri ce sentiment de déclin. Pour l'économiste Nicolas Bouzu, "la fiscalité pèse essentiellement sur les classes moyennes. Ceux en dessous bénéficient d'exemptions ; ceux en dessus peuvent échapper à l'impôt grâce aux dispositifs d'allègement".

 

 

Ainsi sur les revenus de 2015, 51,4 % des ménages ne paient pas d'impôts sur le revenu (dont une partie des classes moyennes), donc bénéficient de prestations sociales et d'allègements (taxe d'habitation, transports). Les contribuables au-dessus du seuil de non-imposition ont supporté l'essentiel de la hausse de 6 milliards depuis 5 ans.

 

 

En outre, pour 460 000 retraités de cet classe moyenne, la CSG a augmenté dans le même temps de 3,8 % à 6,6 % de leurs revenus. Quant aux hausses de taxe foncière (+ 35 % en 10 ans) elles pèsent aussi, sur cette classe moyenne composée à 68 % de propriétaires.

 

 

 

Un logement coûteux

 

En 2013, un accédant à la propriété ou un locataire dans le privé consacrait 27 % de ses ressources à son logement (38 % selon le Crédoc - Centre de recherche sur les conditions de vie - en ajoutant l'énergie et l'eau). Pour ses parents en 1989, la part n'excédait pas 15 %.

 

 

"Le reste à vivre" : les vacances, les loisirs, l'équipement ménager, l'habillement, l'épargne, selon le Crédoc, un salarié seul avec 1 467 € net mensuel après impôts n'a plus que 294 € soit 20 % pour ces budgets. Or ce sont des marqueurs sociaux forts pour la classe moyenne.

 

 

 

Des professions, des diplômes dévalorisés

 

C'est un autre critère majeur pour la classe moyenne. Le prof à bac + 4 au salaire gelé pendant neuf ans, l'infirmière qui a perdu la défiscalisation des heures sup, l'artisan aux charges passées de 32 % à  43 % en dix ans, le salarié de PME sous-traitante contrainte de ne pas remplacer les les partants et de bloquer les salaires, voient les écarts avec la classe "populaire" diminuer . diminuer et avec la classe riche augmenter. En 1999, selon l'Insee quand la catégorie populaire gagnait 100, la moyenne se situait à  220, et les plus riches à 748. En 2014, à euros constants, le populaire gagne 111, le moyen 156, le riche 975.

 

 

Cette dévalorisation du diplôme nourrit chez les jeunes le sentiment qu'ils vivront moins bien que leurs parents. Au XXe siècle, cela n'est jamais arrivé. À lire Louis Chauvel, aujourd'hui, c'est la réalité. Un vrai débat pour la présidentielle.

 

 

 

 

 

Les inégalités de patrimoine se creusent

 

 

En France, mieux vaut bien hériter que gagner un bon salaire. C'est le constat de Louis Chauvel, qui pointe l'importance du patrimoine dans les revenus actuels.

 

 

Un point de vue déjà défendu par Thomas Piketty dans son ouvrage, le capital au XXIe siècle, en 2013. L'économiste évoquait le risque du retour à une "société d'héritiers", comme à la Belle Époque, où les revenus du travail ne permettaient pas de compenser les inégalités de patrimoine.

 

 

Les écarts de patrimoine se sont accrus entre 2004 et 2010 selon l'Insee. Les 10 % les plus modestes en termes de patrimoine détiennent au maximum 2 700 euros chacun, soit 205 fois moins. Les inégalités de patrimoine sont beaucoup plus marquées que celles des revenus. À titre de comparaison, le revenu disponible des 10 % de ménages les plus modestes est 4,2 fois moins élevé que celui des 10 % les plus aisés en 2009.

 

 

C'est notamment la hausse de l'immobilier qui a creusé ces écarts, toujours plus forts entre locataires et propriétaires. En 2010, le patrimoine brut des ménages est principalement constitué de biens immobiliers (62 %).

 

 

À cela s'ajoute une fracture générationnelle. Le montant du patrimoine varie avec l'âge. Les ménages seniors (60 ans ou plus) ayant bénéficié d'un héritage, disposent d'un patrimoine plus important. Pourtant les salariés, les inégalités de patrimoine selon la catégorie socioprofessionnelle sont très marquées : le patrimoine médian des cadres est ainsi 35 fois supérieur à celui des ouvriers non qualifiés.

 

 

 



03/09/2016
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