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L'AIR DU TEMPS

le Progrès du vendredi 2 décembre 2016

 

 

 

PRÉSIDENTIELLE - DANS UNE ALLOCUTION-SURPRISE, HIER SOIR À LA TÉLÉVISION

 

 

François Hollande se résigne et renonce pour 2017

 

 

 

C'est un séisme politique : pour la première fois sous la Ve République, le chef de l'État sortant renonce à briguer un second mandat. À vrai dire, François Hollande n'avait pas vraiment le choix.

 

 

Jamais on n'avait vu un président de la Ve République renoncer à postuler à une deuxième mandat. Eh bien c'est fait : François Hollande a annoncé hier soir solennellement à la télévision qu'il ne briguerait pas sa propre succession. "Je suis conscient des risques que ferait courir une démarche, la mienne, qui ne rassemblerait pas largement autour d'elle. Aussi, j'ai décidé de na pas être candidat à l'élection présidentielle", a-t-il lancé, après un long plaidoyer pour vanter son bilan. Il a fallu attendre près de neuf minutes d'allocution, prononcée d'une voix morne, mi-résignée, mi-apaisée - loin en tout cas de son parler saccadé habituel - pour que le chef de l'État mette les pouces.

 

 

 

"Éviter l'humiliation"

 

Il ne le fait visiblement pas de gaîté de coeur. Jusqu'au bout il a montré une détermination à "y aller". Mais, un à un, ses plus proches ont tiré la sonnette d'alarme. Jean-Pierre Mignard, l'un de ses amis les plus intimes, avait demandé dès le 20 octobre "d'éviter l'humiliation" d'une inexorable défaite. C'était une semaine après la parution du livre qui a scellé le destin de François Hollande : "Un président ne devrait pas dire ça". Un livre de confessions maladroites, de narcissisme stupéfiant, où il va jusqu'à avouer des assassinats ciblés de terroristes couverts par le secret défense.

 

 

L'ouvrage n'a pas coupé les ailes de François Hollande. Elles étaient déjà bien rognées avant sa parution, par le chômage, les hausses d'impôt pour les classes moyennes, les couacs gouvernementaux à répétition, les interminables polémiques sur la déchéance de nationalité, la loi Travail... "Un président ne devrait pas dire ça" a simplement cloué définitivement le chef de l'État dans la boue, au moment où il tentait de reprendre un peu de hauteur après, notamment, son discours de rentrée à la salle Wagram à Paris, bien reçu par la gauche.

 

 

Ces dernières semaines, tout le monde ou presque s'est ligué autour de François Hollande pour le dissuader de se crasher dans une primaire de tous les risques. Son ancienne compagne Ségolène Royal et ses enfants, et de plus en plus de politiques. Manuel Valls a littéralement fait le siège de l'Élysée, allant jusqu'à menacer dimanche de se présenter contre François Hollande à la primaire de la gauche, les 22 et 29 janvier. D'autres sont restés beaucoup plus "soft", comme Jean-Yves Le Drian, qui lui a toujours été fidèle. Partout le message était le même : "N'y vas pas, tu n'as aucune chance".

 

 

 

Après Sarkozy...

 

La large victoire de François Fillon à la primaire de la droite a peut-être la dernière goutte à faire déborder le vase. Il n'était un secret pour personne que François Hollande misait beaucoup sur un nouveau duel avec Nicolas Sarkozy pour parvenir à rassembler la gauche derrière lui. Sarkozy était l'épouvantail rêvé du premier tour pour inciter au "vote utile".

 

 

Mais Sarkozy a disparu et Hollande risquait la même chose à la primaire de gauche : les électorats ont une fâcheuse tendance à couper les têtes ces temps-ci, de Washington à Paris, en passant par Londres... Les Français ne voulaient pas d'une revanche ; ils ne l'auront pas.

 

 

 

"Lucidité"

 

C'est quand François Hollande a prononcé le mot "lucidité", peu avant de formaliser son renoncement, qu'on a compris que l'éternel optimiste avait, cette fois-ci, accepté l'inévitable.

 

 

Il n'a pas désigné de "successeur", mais il ne fait de doute pour personne que Manuel Valls sera le candidat de la gauche de gouvernement lors de la primaire socialiste. Le Premier ministre pourrait se déclarer lors du meeting "de la Belle alliance populaire" ce samedi. À lui maintenant de prendre la mitraille de la primaire : de Montebourg à Hamon, en passant par Filoche et Lienemann, les frondeurs ne renonceront pas à tirer sur l'exécutif. Patrick Fluckiger

 

 

 

 

Un bilan, et combien de divisions !

 

Et pourtant, il y arrivé... Petitement, tardivement, mais ça y est, la courbe du chômage s'inverse depuis février. La principale condition mise à une candidature a été remplie, elle n'a pas suffi.

 

 

C'est que dans le bilan manque un autre engagement, non tenu : prouver sa capacité de rassemblement. Il le reconnaît en pointant le "risque" qu'aurait fait courir sa candidature à l'unité de sa famille politique. Et c'est dans ce registre qu'il faut ranger le seul "regret" avoué hier devant les Français, sur la déchéance de la nationalité : "Je pensais qu'elle pouvait nous unir, elle nous a divisés".

 

 

La division est apparue dès le premier été du quinquennat : vingt députés socialistes votaient contre le traité européen fixant les règles de la rigueur. Ils se retrouveront nombreux contre la "loi Macron", conduite par un ministre aujourd'hui candidat hors la majorité. À nouveau nombreux, avec la CGT et Force ouvrière, pour s'opposer à la loi Travail et jalonner le printemps de manifestations.

 

 

Au coeur de la division, un malentendu entre le candidat et sa future majorité, et sans doute nombre de ses électeurs : ceux-ci pensaient avoir élu un socialiste, à tout le moins un social-démocrate, ils ont eu une politique social-libérale.

 

 

François Hollande aura également divisé les Français, mais à dessein, pour mieux rassembler la gauche, sur le mariage pour tous : "J'ai fait avancer les libertés, l'égalité entre les couples a été renforcée", a-t-il souligné - et le renoncement de la droite à revenir sur cette réforme lui vaut quitus.

 

 

Il a enfin mené des guerres, énumérées hier soir : Centrafrique, Syrie, Mali... Il aura obtenu dans ces actions un soutien dépassant largement la gauche - et notamment dans la guerre jamais finie contre le terrorisme. Jusqu'à cette proposition sur la déchéance de la nationalité... Il s'inquiétait récemment qu'on dise de lui : "Il n'a rien fait !" Ce reproche lui sera épargné, au moins. Francis Brochet



03/12/2016
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