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L'AIR DU TEMPS

Le Progrès du samedi 23 mai 2015

 

 

SYRIE - "Ils coupent les têtes, priez pour nous". Dans deux monastères, plusieurs centaines de chrétiens menacés par l'Etat islamique. La communauté chrétienne de Qaryatayn, ville proche de Palmyre, subit-elle déjà le joug de l'Etat islamique ? Un prêtre syrien a laissé un dernier message inquiétant à ses amis helvètes.

 

 

"Daech approche de notre ville de Qaryatayn après leur domination de Palmyre, où ils ont tué beaucoup de gens en coupant les têtes. C'est terrible ce que nous vivons. Aujourd'hui nous sommes là, demain on ne sait pas... Priez pour nous S.V.P". C'est le dernier message adressé jeudi midi par le père syrien Jacques Mourad à l'association suisse "Les Amis de Mar Moussa", du nom du monastère réputé du centre de la Syrie, situé à cent kilomètres de Palmyre.

 

 

Depuis, plus de nouvelle du religieux, alors que la cité antique, inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO, tombait aux mains des troupes de l'Etat islamique. Le père Mourad, ainsi qu'un diacre de sa communauté, ont selon toute vraisemblance été enlevés, alors même qu'ils préparaient l'accueil de réfugiés en provenance de Palmyre.

 

 

Jointe hier, Laure Speziali, présidente suisse de l'association, confirme : "Nous n'avons plus de nouvelles... D'habitude, c'est quelqu'un de plutôt confiant, mais d'un coup, on l'a senti devenir désespéré". Ces derniers mois, la situation s'est "clairement détériorée", expose-t-elle, pour les cinq cents chrétiens installés à Qaryatayn. De retour de Syrie, Roberto Simona, autre ressortissant suisse et ancien de la Croix-Rouge, rapportait, il y a à peine une semaine dans le Matin "le niveau d'étrangeté de Qaryatayn", où "chrétiens, rebelles et soldats de Daech se côtoyaient en toute décontraction, les gens faisant la guerre à l'extérieur". Le vent semble avoir tourné. La fin du miracle de Qaryatayn ? "Déjà, certains combattants ne respectaient plus l'accord..."

 

 

Un lien entre les deux communautés

 

Le père Mourad, lui, avait été chargé il y a une dizaine d'année par le père Paolo Dall'Oglio, fondateur italien de Mar Moussa (où resteraient cinq moines syriens), de restaurer celui, voisin, de Mar Elian. "J'y suis allée souvent", poursuit la représentante associative, "le père Mourad travaillait énormément pour les deux communautés, chrétienne et musulmane, c'était une principe de base. Il disait entretenir de très bonnes relations avec les autorités religieuses locales". Depuis le début du conflit en Syrie, il avait accueilli dans son prieuré des centaines de réfugiés, toutes religions confondues. Mais la pression djihadistes de Daech s'est intensifiée.

 

 

"Le prêtre avait réussi à négocier avec toutes les parties pour que personne ne rentre dans la ville", souffle, émue, Laure Speziali, "mais il semble qu'à Qaryatayn, des gens favorables à Daech ont facilité l'intrusion...". Des "cellules dormantes" souvent utilisées par l'Etat islamique pour faciliter son implantation locale. L'oasis de Qaryatyn, citée dans les textes bibliques, intéresse aussi les islamistes stratégiquement, car elle se situe sur la roue d'Homs et de Damas. Les religieux chrétiens payent un lourd tribut, rappelle l'association : le père Frans, un jésuite, a été assassiné en avril 2014 à Homs ; le père Paolo Dall'Oglio, d'abord expulsé de Syrie parce qu'il avait soutenu les rebelles contre le régime syrien de Barchar al-Assad, a disparu en juillet 2013. Il était parti à Raqqa négocier auprès de Daech la libération d'otages. "Tout le monde l'en dissuadait", se souvient son amie helvète, Paolo avait dit "ne vous inquiétez pas, sauf au bout de deux jours. Depuis ce rendez-vous avec l'Etat islamique, on n'a jamais eu de nouvelles fiables de lui. Xavier Frère

 

 

D'après le récent classement de l'ONG Portes Ouvertes sur la persécution des chrétiens dans le monde, l'Irak et la Syrie occupent les 3e et 4e rangs derrière la Corée du Nord et la Somalie. En Syrie, on estime que 40 % de la population chrétienne a quitté le pays.

 

 

 

Daech consolide ses positions

 

Tout en répétant que Barchar al-Assad et son régime n'avaient pas de place dans l'avenir de la Syrie, le président français François Hollande a appelé hier à de nouvelles négociations à Genève en vue d'une "solution politique". Les djihadistes du groupe Etat islamique (EI) ont pris jeudi au régime en Syrie le dernier poste frontalier avec l'Irak, consolidant leur emprise sur une vaste zone transfrontalière après la conquête de Palmyre, dont les trésors archéologiques sont menacés. Désormais, les trois passages frontaliers avec l'Irak échappent au régime de Barchar al-Assad : celui de Boukamal est aussi aux mains de l'EI et le poste de Yaaroubié, plus au nord, est contrôlé par les forces kurdes.

 

 

Outre cette région, l'EI contrôle la majeure partie des provinces de Deir Ez-Zor et Raqa (nord), et a une forte présence dans les provinces de Hassaké (nord-est), d'Alep (nord), de Homs et de Hama (centre). Il est aussi maître de la quasi-totalité des champs pétroliers et gaziers de Syrie, qui lui assurent une importante source de revenus.

 



24/05/2015
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