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MOYEN-ORIENT - Conflit. Bataille d'Alep : un tournant en Syrie. Le bombardement et le siège d'Alep, deuxième ville du pays, par le régime syrien appuyé par les forces russes pourrait faire basculer le conflit. Il provoque aussi un nouveau drame humanitaire. A Bab-Al Salam, à la frontière turco-syrienne, des milliers de Syriens fuient la province d'Alep devant l'avancée des forces loyalistes appuyées par les Russes.

Alep, deuxième ville de Syrie, mais province la plus peuplée du pays, va-t-elle connaître le même sort que Homs, assiégée, affamée, puis détruite en grande partie ? Depuis quelques jours, les troupes de Bachar al-Assad, appuyées par les bombardements russes (1 113 missiles en un mois selon le Syrian Institute for Justice and accontability (Sija), dont une minorité a ciblé Daech) et des éléments iraniens ont intensifié leur offensive autour de cette ville, considérée comme un point de passage vital vers la Turquie.

Les groupes rebelles, dont l'Armée syrienne libre, qui occupaient depuis trois ans principalement l'est de cette métropole, semblent réfléchir face à la puissance du feu de l'alliance russo-syrienne. La ville qui comptait 1,5 millions d'habitants au début de la guerre civile il y a cinq ans, n'en compterait plus que 350 000. Plusieurs dizaines de milliers d'entre eux ont fui ces dernières heures, tentant de rejoindre la frontière turque, verrouillée depuis l'automne.

Un tournant décisif ?

"La bataille d'Alep est le centre de l'échiquier syrien, c'est peut-être un tournant décisif dans la guerre", analyse Fabrice Balanche, géographe de l'Université Lyon2, associé au Washington Institute. L'armé syrienne et ses alliés ont coupé la route du Nord. Un accord tacite entre le régime Assad et les forces kurdes peut favoriser la neutralisation des rebelles, contre les djihadistes du Front al-Nosra (rallié à Al-Qaida), ou les salafistes d'Ahrar al-Sham soutenus par l'Arabie saoudite (Le pays se dit prêt "à envoyer des troupes au sol en Syrie" si la coalition menée par les Etats-Unis lance une telle opération), le Qatar et la Turquie. "Ces groupes se sont parfois opposés sur le terrain", et restent des adversaires de Daech, qui tient lui la zone d'Al-Bab à l'est d'Alep. La Turquie pourrait-elle envisager "une intervention militaire", comme l'ont soupçonnée les Russes cette semaine ?

Russes maîtres du jeu, Occidentaux impuissants ?

Les Occidentaux, qui avaient soutenu au départ ces groupes rebelles pour déstabiliser Assad, semblent hors-jeu dans ce jeu d'échecs syrien. "Les derniers succès d'Alep placent Vladimir Poutine au centre de cet échiquier", juge Fabrice Balanche, "contrairement aux prévisions que l'intervention russe ne ferait qu'une petite différence dans le conflit ou que Moscou s'enliserait dans un autre bourbier". Le président russe aurait d'ores et déjà atteint son triple objectif : "protéger la côte pro régime où la Russie a installé ses bases logistiques ; renforcer Assad et éloigner les rebelles de principales villes du pays (Homs, Lattaquié, Alep et Damas) ; couper les soutiens étrangers aux rebelles".

Immenses flux de réfugiés à venir

Les négociations pour la paix en Syrie, ajournées mercredi à la demande de la délégation du Haut comité des négociations (HCN), représentant l'opposition syrienne, ne reprendront (normalement) que le 25 février. Moscou avait rejeté le lendemain les accusations occidentales d'"avoir saboté" ces discussions. Quelle position doit tenir l'Union européenne dans cette phase primordiale du conflit en Syrie ? L'Europe a exhorté hier hier la Turquie "d'ouvrir ses frontières aux réfugiés d'Alep". Charles Lister, expert anglo-américain du terrorisme et du Moyen-Orient, tweetait hier : "L'Europe doit se préparer à des flux de réfugiés comme elle n'en a jamais connus avant. Alep se vide en masse. Xavier Frère