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L'AIR DU TEMPS

la Tribune du lundi 9 mars 2015

 

 

 

AFRIQUE - La terreur est de retour au Mali. Deux ans après la première intervention des forces françaises. Attaque meurtrière en plein Bamako vendredi, tirs de roquette meurtriers à Kidal hier, lynchage à Gao : dans ce contexte sécuritaire troublé, la France n'a pas terminé au Mali sa "guerre contre le terrorisme".

 

 

 

"Nous avons gagné cette guerre. Nous avons chassé les terroristes. Nous avons sécurisé le Nord. Et enfin, nous avons, vous avez réussi à organiser des élections de façon incontestable, et le vainqueur est aujourd'hui président du Mali". C'était le discours du président François Hollande le 19 septembre 2013 à Bamako, capitale du Mali.

 

 

 

Le "chef de guerre" français était acclamé, accueilli comme un libérateur en pleine opération Serval. Un an et demi plus tard, il faut se rendre à l'évidence : si un scrutin démocratique a pu se dérouler grâce à la présence de la France et de l'Onu, les trois autres points énoncés par le président sont loin d'être résolus. "Il s'est montré très optimiste. Soit il a été mal conseillé, soit il a joué un coup de bluff", juge Lemine Ould M. Salem, spécialiste mauritanien du Sahel et du djihadisme, "on ne peut pas écarter une menace pareille. Cette idéologie djihadiste est ancrée dans le nord du pays depuis plus de vingt ans, il y a eu un défaut d'analyse de la situation".

 

 

 

L'attentat de vendredi en plein centre de Bamako, qui a fait cinq victimes, dont un Français, a brutalement rappelé au chef d'Etat français que la fièvre djihadiste n'avait pas été éradiquée du territoire malien. En revendiquant cette attaque, le groupe islamiste al-Morabitoune et son chef Mokhtar Belmokthar démontrent que leur capacité de nuisance n'a été affaiblie qu'en apparence par l'opération Serval, puis par l'opération Barkhane, élargie à la bande sahélo-saharienne.

 

 

 

Samedi, François Hollande a confirmé à son homologue malien le "soutien total de la France dans la lutte contre le terrorisme" et des "mesures communes pour renforcer la sécurité au Mali", y compris pour celle des 6 200 ressortissants français. Ce discours officiel s'est trouvé plombé dès hier avec une nouvelle attaque, contre les forces de l'Onu cette fois, qui a fait trois victimes, deux enfants et un soldat tchadien, à Kidal, ancien fief des insurgés islamistes réputé pour son insécurité. Sans compter qu'à Gao, où la France occupe depuis 2013 une base avec un millier d'hommes, deux jeunes, suspectés d'avoir posé des bombes, ont été lynchés à mort samedi.

 

 

 

L'instabilité est revenue

 

C'est dire à quel point l'instabilité est revenue à un seuil très élevé, alors que se négocient des accords de paix cruciaux pour l'avenir du pays, et pas seulement. L'Algérie limitrophe et la France ont beaucoup à gagner dans ce possible accord, mais la situation actuelle n'incite pas à l'optimisme pour la réconciliation. Le nord, et sa proximité avec la Libye, reste un territoire difficilement maîtrisable. Et la sécurité reste assurée essentiellement par les forces françaises, l'armée malienne n'étant pas encore en capacité de prendre le relais, selon une source militaire. "La France n'a que le choix de rester aujourd'hui", pense Lemine Ould M. Salem, "si elle se retirait, en moins de cinq semaines, les djihadistes et touaregs reprendraient facilement le nord du Mali".

 

 

 

Combien de temps Paris devra-t-il encore tenir ce rôle de "gendarme" ? "Dix ans, comme les Américains en Irak ?", se demande l'expert mauritanien, le problème majeur étant selon lui que la France n'a pas envisagé "de scénario de sortie de crise". Xavier Frère

 

 

 

 

 

 

 

Le lycée français de Bamako sera exceptionnellement fermé deux jours, à compter de lundi, afin que sa sécurité soit renforcée, a annoncé hier l'établissement.

 

 

 

 

 

QUESTIONS à Lemine OULD M. SALEM

 

 

 

Journaliste mauritanien, spécialiste du Sahel

 

 

 

 

 

"Belmokhtar peut frapper dans n'importe quelle capitale africaine"

 

 

 

 

L'attentat de Bamako porte-t-il la "signature" de Belmokhtar ?

 

On savait que c'était possible. La question était de savoir quand, et avec quel mode opératoire. Il est capable d'activer des cellules dormantes de ses nombreux partisans dans des grandes capitales africaines. Cette rue-là, à Bamako, était une cible idéale.

 

 

 

 

Après la prise d'otages sanglante à In Amenas, en Algérie, Belmokhtar s'était fait plutôt discret...

 

Cette une situation d'opportunité, et dans la tradition djihadiste, on lie les actes à l'actualité. En janvier, dans un communiqué, Belmokthar s'était félicité des attentats en France et avait alors promis de "venger le prophète". C'est à la fois un acte de représailles, doublé d'un acte de vengeance après la mort en décembre 2014 d'Ahmed al-Tilemsi, son financier, tué par les forces françaises.

 

 

 

Quels sont son profil et son ambition ?

 

Lors de l'opération Serval, Belmokthar a effectué un repli tactique : ses hommes, environ 500/600 aujourd'hui, ont été relativement épargnés. C'est un homme d'action qui s'est appliqué pour apprendre, et qui a réussi à très bien s'entourer. Comme son modèle absolu reste Ben Laden, il est fidèle à al-Qaida. Il estime que les conditions du califat d'al-Bagdhdadi (EI) ne sont pas réunies, mais lui se verrait bien calife dans la région saharo-sahélienne. Propos recueillis par X.F.

 

 

 



09/03/2015
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