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L'AIR DU TEMPS

Franceinfo - le lundi 15 avril 2019

 

 

Téléphonie mobile, pêche électrique, données personnelles… Qu'a fait le Parlement européen depuis cinq ans 

 

 

 

 

 

 

Le Parlement sortant tient du lundi 15 au jeudi 18 avril sa dernière session plénière avant les élections européennes du 26 mai

 

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L'hémicycle du Parlement européen, à Strasbourg, le 14 juillet 2019. (DOMINIQUE FAGET / AFP)

 

 

 

 

Des textes parfois difficiles à comprendre, un rôle méconnu, des décisions qui ne font pas la une… L'actualité du Parlement européen, pourtant élu au suffrage universel direct depuis 1979, ne passionne pas les foules. Pour autant, depuis le traité de Lisbonne, entré en vigueur il y a dix ans, l'institution a acquis un pouvoir important. Conjointement au Conseil (qui représente les gouvernements des 28 Etats membres), le Parlement est chargé de voter la législation (directives et règlements) applicables en Europe, le budget européen, mais aussi de contrôler la Commission européenne, organe exécutif de l'UE.

 

 

Alors, que retenir des cinq années de travaux du Parlement sortant, qui tient du lundi 15 au jeudi 18 avril sa dernière session plénière avant les élections européennes du 26 mai ? Depuis les élections de 2014, près de 1 000 propositions ont été débattues, améliorées et conclues après les négociations avec le Conseil, vante l'institution sur son site internet.

 

 

Frais de téléphonie mobile en Europe, pesticides, droit d'asile, données personnelles… En cinq ans, le Parlement européen a balayé de nombreux sujets qui concernent directement la vie des citoyens européens. Voici une sélection (non exhaustive) des votes les plus emblématiques intervenus entre 2014 et 2019.

 

 

 

Le téléphone mobile sans frais supplémentaires dans toute l'Europe

Téléphoner ou consulter internet sur son smartphone lorsqu'on se trouve en vacances ou en déplacement professionnel dans un pays de l'UE ne coûte désormais pas un centime de plus. Pour les citoyens européens, cette mesure est l'une des plus concrètes prises ces cinq dernières années. Le texte sur la fin du roaming, définitivement voté par le Parlement européen le 27 octobre 2015, avait été impulsé en 2013 par la Commission européenne sous le précédent mandat. Mais jusqu'à son entrée en vigueur le 15 juin 2017, les eurodéputés ont pesé de tout leur poids pour que les modalités de mise en œuvre soient plus favorables au consommateur que ce que prévoyaient le Conseil de l'UE et la Commission européenne.

 

 

 

L'interdiction de la pêche électrique

Les eurodéputés ont eu raison de cette pratique accusée d'occasionner de graves blessures aux poissons et de détruire l'écosystème des fonds marins. La pêche à impulsion électrique, surtout utilisée aux Pays-Bas, a donné lieu à de très vifs débats en Europe pendant cette mandature. A la pointe du combat, il y a Bloom, une ONG qui milite pour la protection des océans et des espèces marines. L'association a d'abord révélé que les Pays-Bas avaient allègrement dépassé le nombre de licences autorisées pour ce type de pêche (84 chalutiers au lieu de 15), avant de s'impliquer fortement pour obtenir son interdiction pure et simple.

 

 

Alors que la Commission européenne, sous la pression de certains lobbys, envisageait au contraire d'étendre cette pratique, le Parlement a voté en janvier 2018 à une large majorité (402 pour, 232 contre, 40 abstentions) l'interdiction totale de la pêche électrique. En matière de législation européenne, un vote des eurodéputés ne suffit cependant pas à l'adoption définitive d'un texte, qui doit également être approuvé par le Conseil des ministres des Vingt-Huit. Jusqu'au bout, les négociations ont été serrées. Un compromis a été trouvé pour interdire cette pratique à compter du 31 juillet 2021. La législation adoptée permet en outre à chaque Etat membre de l'interdire dans ses propres eaux avant la date butoir. Une proposition de loi en ce sens signée par 135 députés français de tous bords vient d'être déposée à l'Assemblée nationale.

 

 

 

L'échec de l'interdiction du glyphosate

Le glyphosate, cet herbicide "probablement cancérogène", selon le Centre international de recherche sur le cancer, a provoqué une intense et durable controverse en Europe. Fin 2017, alors que l'autorisation de mise sur le marché de ce produit arrivait à échéance, le Conseil des ministres européens a validé in extremis une prolongation pour cinq ans, grâce notamment au revirement surprise de l'Allemagne. Un camouflet pour les Etats qui étaient opposés à cette prolongation comme la France, l'Italie et l'Autriche, mis en minorité.

 

 

Dans cette affaire, le Parlement n'a rien pu faire. Les eurodéputés avaient voté, un mois plus tôt, une résolution exigeant une interdiction progressive du glyphosate dans un délai de cinq ans. Une prise de position jugée trop molle par la gauche de l'Hémicycle, et de surcroît non contraignante, car le Parlement européen n'est en réalité pas compétent dans le domaine des autorisations de mise sur le marché des produits phytosanitaires.

 

 

Les eurodéputés n'en sont cependant pas restés là : après les Monsanto Papers, qui ont révélé les pratiques controversées des lobbys pro-pesticides – en particulier de Bayer-Monsanto, le fabricant du célèbre Round Up –, le Parlement européen a créé une commission d'enquête sur ces procédures de mise sur le marché. Ses recommandations, visant à plus de transparence, ont été votées à une écrasante majorité en séance plénière.

 

 

 

Un traité de libre-échange controversé avec le Canada

Le vote du traité de libre-échange entre le Canada et l'Union européenne(Ceta) a été l'une des décisions les plus controversées de la mandature. Cet accord, qui prévoit la suppression des droits de douane entre les deux ensembles économiques sur les principaux biens et services, a été signé le 15 février 2017 par 408 voix, contre 254 et 33 abstentions.

 

 

D'un côté, le centre-droit, les libéraux et la plus grande partie des sociaux-démocrates a vu dans ce texte "une chance pour l'Union européenne" dans l'économie mondiale. A l'inverse, les partis d'extrême droite, d'extrême gauche, mais aussi les Verts et une partie de la gauche (dont les socialistes français) ont dénoncé des risques pour l'environnement, un nivellement par le bas des normes sanitaires, une menace pour les produits européens, voire des destructions d'emplois.

 

 

Conséquence du vote du Parlement européen, la quasi-totalité du texte a pu entrer en vigueur de manière provisoire le 21 septembre 2017, même si son approbation définitive est soumise au vote des parlements nationaux et, dans certains Etats, régionaux. Un an et demi après, une hausse des exportations depuis l'Union européenne vers le Canada a été enregistrée, mais il est trop tôt pour évaluer la réalité des risques mis en avant par les détracteurs de l'accord.

 

 

 

Le RGPD : une meilleure protection des données

Protéger les données des Européens à l'heure du numérique. C'est le but du règlement général sur la protection des données, plus connu sous son acronyme RGPD, et adopté par le Parlement européen le 14 avril 2016 après quatre années de négociations. Ce texte a mis en place toute une série de mesures encadrant la collecte, le traitement et l'utilisation des données personnelles des Européens. Les entreprises qui en collectent ne peuvent désormais le faire qu'après avoir recueilli le consentement explicite de la personne concernée. Cette dernière dispose en outre d'un droit à l'effacement des données à caractère personnel qui la concernent.

 

 

Le RGPD a permis d'harmoniser le droit applicable dans les 28 Etats de l'Union européenne. Il s'agit en effet d'un règlement, texte qui s'applique directement et uniformément dans toute l'Union européenne, à la différence d'une directive qui nécessite une transposition dans les législations de chaque pays. "C'est un vrai succès. Avec ce texte, on est vraiment passé du XXe au XXIe siècle", se félicite l'eurodéputée socialiste Sylvie Guillaume.

 

 

 

Un "passenger name record" pour lutter contre le terrorisme

Le vote a été salué par certains comme une avancée dans la lutte contre le terrorisme, mais dénoncé par d'autres comme un fichage des voyageurs. La création du registre européen des données des passagers aériens (Passenger name record, ou PNR) a été adoptée le 14 avril 2016. Sans toutefois faire l'unanimité, car le PNR n'est en réalité pas un fichier unique centralisant toutes les informations : les compagnies aériennes ont l'obligation de transmettre ces informations aux Etats, libre à eux par la suite de se les partager ou non.

 

 

L'adoption de ce texte n'a pu être obtenue qu'après cinq ans de négociations laborieuses et de blocages. La vague d'attaques terroristes qui a touché l'Europe, en particulier les attentats du 13 novembre 2015 à Paris, a accéléré le processus. Les groupes politiques qui s'opposaient à la mise en place du PNR (une partie de la gauche et les Verts) ont finalement accepté de le voter après avoir obtenu l'adoption le même jour du texte sur la protection des données en Europe (RGPD).

 

 

 

Une réforme du droit d'asile dans l'impasse

Le mécanisme dit de Dublin III, selon lequel le pays responsable de la demande d'asile d'un migrant est l'Etat membre par lequel il est entré dans l'UE, ne parvient pas à être réformé. La crise migratoire qui dure depuis plusieurs années a pourtant montré qu'une réforme – un Dublin IV, donc – était nécessaire afin de ne pas faire peser la prise en charge des migrants exclusivement sur les pays d'entrée comme l'Italie, la Grèce ou l'Espagne, alors qu'ils ne sont pas forcément les pays dans lesquels les migrants souhaitent s'installer.

 

 

Le 16 novembre 2017, le Parlement européen a voté une réforme appelant à une meilleure répartition des demandeurs d'asile. Ces derniers pourraient ainsi être autorisés à déposer leur demande dans des pays avec lesquels ils ont tissé des liens (famille, amis, études…). Le texte pose également le principe des quotas d'accueil pour chaque pays et d'éventuelles sanctions financières pour les Etats qui ne joueraient pas le jeu. Le texte a été largement approuvé (390 voix pour, 175 contre et 44 abstentions).

 

 

"On avait réussi à se mettre d'accord, à substituer un modèle à un autre, c'était un tour de force, se souvient l'eurodéputée socialiste Sylvie Guillaume. Mais le projet est bloqué depuis deux ans et pendant ce temps-là, les morts continuent." Principale raison de ce blocage, les dissensions au sein des Vingt-Huit, qui ne parviennent pas à se mettre d'accord. Dublin IV illustre une réalité criante dans le fonctionnement des institutions européennes : la bonne volonté du Parlement européen pèse peu face aux Etats membres et à leurs intérêts propres.

 



15/04/2019
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