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L'AIR DU TEMPS

Franceinfo - le dimanche 9 juin 2019 - mis à jour le 10.06.19

 

 

Tulle et Oradour

La traversée du Limousin de la Das Reich

 

 

Bernard Gouley et Hélène Abalo - France 3 Nouvelle-Aquitaine - Publié le , mis à jour le  

 

 

 

A l'occasion du 75e anniversaire des massacres de Tulle (Corrèze) et d'Oradour-sur-Glane (Haute-Vienne), France 3 Nouvelle-Aquitaine vous propose de retracer l'itinéraire de la Das Reich, la division SS qui va commettre plusieurs exactions sur son parcours du sud de la France à la Normandie. 

 

 

 

Oradour-sur-Glane : suivez les commémorations du 75e anniversaire du massacre du 10 juin 1944

Ce 10 juin 2019, Oradour-sur-Glane commémore le 75e anniversaire du massacre perpétré par les SS de la  Das Reich, le 10 juin 1944, dans ce petit village de Haute-Vienne. 642 enfants, femmes et hommes ont péri, fusillés ou brûlés vifs. Suivez les commémorations avec France 3 Limousin. 

 

 

 

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 © André Abalo - France 3 Limousin

 

 

#1 : Le 6 juin 1944

À l’aube du 6 juin 1944, une armada de navires approche des côtes normandes. 156 000 soldats, principalement Américains, Anglais, Canadiens, s’apprêtent à débarquer en Normandie. Parmi eux, les 177 Français du commando Kieffer. Le débarquement provoquera la mise en route de la division Das Reich.

Les alliés débarquent sur cinq plages désignées Gold, Juno, Sword, Omaha et Utah. Cette action militaire hors-norme  libère la France, mais elle permet surtout d’ouvrir un second front contre les Allemands. Le premier, à l’est, est l’affaire des Soviétiques. La finalité est de les prendre en tenaille. Ce sera chose faite à partir de janvier 1945 où les combats se dérouleront en Allemagne même.



L’état-major allemand savait que les alliés poseraient pied un jour sur les côtes françaises, mais c’est le lieu qui restait inconnu. Les services secrets britanniques, doués pour brouiller les pistes avaient laissé entendre depuis 1943 que le débarquement aurait lieu du côté du Pas-de-Calais. Conséquence : l’armée allemande a concentré ses forces dans le nord de la France jusqu’au Pays-Bas. Seconde conséquence : les troupes basées en Normandie sont soit des hommes âgés, peu performants ou au contraire des très jeunes sans beaucoup d’expérience.



Lorsque les navires alliés approchent des côtes, l’effet de surprise est total côté allemand : la météo depuis plusieurs affichait pluies et vents donc peu favorable à un débarquement selon l’analyse de l’état-major allemand. Une éclaircie et une mer calme étaient prévues le 6 juin, mais cette information n’était connue que des alliés grâce à leur station météo basée dans l’Atlantique. Les soldats de la Wehrmacht sont dans les premières heures désemparés par ce déferlement d’hommes sur les plages.

 

 

Mais à Omaha Beach, l’une des quatre plages situées dans le Cotentin, les Américains ont rencontré de sérieuses difficultés. Quand la première vague de combattants a foulé le sable à 6h35, la mer était basse. Cela a obligé les hommes à courir 500 mètres à découvert avant de pouvoir se mettre à l’abri. A 7h du matin, 58 chars américains débarquent sur la plage. A la fin de la journée, il n’en reste que trois. Omaha Beach portera le nom de Omaha la sanglante.



Le Débarquement à l’issue de cette première journée est une "réussite" pour les alliés même si le bilan est lourd : 11 000 tués ou disparus.



Ce 6 juin, toutes les forces allemandes présentes sur le territoire français ont ordre de rejoindre le front en Normandie. A plus de 700 kilomètres, à Montauban, apprenant la nouvelle du Débarquement, la division Das Reich reçoit l’ordre de se mettre en route et de rejoindre la Normandie.

 

 

 

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 © INA

 

 

#2 : La Das Reich

Le 6 juin 1944, après cinq années d’occupation allemande, la libération de la France commence avec le débarquement anglo-américain sur les plages normandes. Toutes les forces militaires allemandes disponibles sont appelées à rejoindre le front normand. C’est dans ce contexte d’urgence et de fin régime que la division allemande Das Reich, basée à Montauban, va se mettre en marche pour la Normandie. Qui compose cette division et quelle est la raison de sa présence dans les environs de Montauban ?



En Allemagne, les officiers provenaient essentiellement de la noblesse et de la grande bourgeoisie. Lorsqu’Hitler accède au pouvoir, il "casse" les codes et permet à des ouvriers et des petits bourgeois d’accéder à des grades d’officier. La Das Reich était composée de ces deux catégories. Ces hommes, pour accéder à cette division délite, appartenaient au parti nazi et devaient faire preuve d’un fanatisme infaillible. La particularité de cette division était la présence de "malgré nous" alsaciens dont certains déserteront en 1944 tandis que d’autres participeront le 10 juin au massacre d’Oradour.



Entre 1942 et 1943, la Division est sur le front russe. Elle subit des pertes considérables tant chez les soldats que les officiers. Près de 20% des officiers et sous-officiers sont revenus de Russie inaptes au combat. L’état-major décide en 1944 de placer des troupes au nord de la Loire et dans le Sud-Ouest en prévision d’un débarquement allié qu’il sait imminent. C’est la première raison de leur venue dans le département du Lot et Garonne. La seconde est de mettre en échec les réseaux de résistance de la région. En avril 1944, les premiers éléments de la Division Das Reich arrivent à Montauban. Au total, ce sont 15 000 hommes qui seront répartis dans une cinquantaine de cantonnements à Montauban et dans les environs.

 


Les premières exactions

 

 

La division avait déjà effectué un séjour à Montauban. C’était en 1940, la France avait signé l’armistice, la population était calme et résignée. En avril 1944, la résistance s’est développée et nombreux sont les Français et Françaises qui estiment à juste titre que la chute du 3e Reich n’est qu’une question de temps.

Fin mai 44, on estimait à 500 000 le nombre de résistants actifs en France dont 10 000 pourvus d’armes dans la Dordogne, la Corrèze, la Haute-Vienne et la Creuse. Côté maquis la consigne donnée à ceux qui suivent De Gaulle est de ne pas bouger tant que les alliés n’ont pas débarqué. Ce groupe représente les deux tiers des résistants en France. Le dernier tiers composé de francs-tireurs et partisans communistes refusent l’autorité de De Gaulle et veulent que la France se libère par elle-même.

Les hommes de la Das Reich sont quant à eux actifs. Ils attaquent les maquis du Lot en mai 1944, effectuent des arrestations à Figeac et des résistants sont fusillés. A partir du 6 juin, l’arrivée des alliés sur les côtes normandes sème un vent de panique parmi les Allemands basés en France. Ils vont redoubler de violence. Oradour-sur-Glane en sera le point culminant.

 

 

 

#3 : La route sanglante

A Montauban, soit à plus de 700 kilomètres de la Normandie, les soldats allemands de la Das Reich apprennent par la population, qui ne cache pas sa joie, que le débarquement a lieu. L’ordre de se préparer à partir pour le front normand est donné le 7 juin. Mais ce n’est que le 8 que la division quitte Montauban.



La première difficulté est d’organiser un périple de plus de 700 kilomètres avec 15 000 hommes et 14 000 véhicules. La Résistance, galvanisée par les nouvelles du Débarquement, a pour mission de ralentir tout soldat allemand qui veut rejoindre le front. Les responsables de la Division le savent : ils ne peuvent plus prendre les routes nationales au risque de tomber dans des embuscades. Le temps pour rejoindre le front sera probablement plus long que prévu.



Une première journée de terreur



Les contacts meurtriers entre soldats allemands et français vont se multiplier tout au long de la journée du 8 juin. Le premier a lieu à 14 km au-delà de Gourdon près du village de Grottière. Des Résistants se positionnent près du pont qui franchit la Dordogne et ouvrent le feu. Les Allemands répliquent et tuent cinq Résistants. Au bourg de Carsac, les Allemands se heurtent à un camion transportant 54 Résistants. 4 sont tués, le cinquième parvient à s’évader. A Gabaudet dans le Lot, des jeunes résistants étaient cachés dans une ferme. Certains d’entre eux sont tombés sur une patrouille de la division. Dix hommes et adolescents et une jeune fille ont été abattus. A Roufflilac-de-Calux, en Dordogne, les Allemands procèdent à de terribles représailles à la suite d’une embuscade de la Résistance : 13 habitants fusillés et jetés aux flammes. 

 

Le bilan de la journée est lourd du côté des Français : la Résistance avancera le chiffre de plusieurs centaines de morts contre une quinzaine de tués et une trentaine de blessés côté allemand. Le but était de ralentir la progression des occupants et au lieu de mettre 3 heures pour effectuer 64 km, les hommes de la Das Reich en ont mis le double.



En Normandie, les Alliés poursuivent leur progression dans les terres. Les Allemands se montrent intraitables : une soixantaine de soldats canadiens prisonniers sont exécutés dans le Calvados au prétexte qu’ils refusaient de répondre à un interrogatoire… Cette violence de masse va s’exercer à Tulle où un détachement de la Division arrive en fin de journée. Tulle qui, depuis 24 heures, est entre les mains de courageux Résistants.

 

 

 

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© DR

 

 

 

#4 : les 99 pendus de Tulle

Le soir du 8 juin, un détachement de la Division Das Reich parvient à Tulle. Depuis presque 48 heures, la ville est entre les mains de la résistance. L’arrivée des SS va permettre aux occupants de reprendre la cité. Les représailles seront terribles.

Le courage et la témérité des résistants 

Le 7 juin, les FTP (Francs tireurs partisans) attaquent, à Tulle, les casernes et les écoles où sont stationnés les soldats de la Wehrmacht. Les miliciens sont également visés. Pendant des heures, c’est une guérilla urbaine qui oppose les deux camps.

Le 8, en début d’après-midi, la quasi-totalité de la ville est entre les mains des résistants et à 16h, une quarantaine d’Allemands en uniforme et en civil se rendent les mains sur la tête. Quelques rues restaient entre les mains de l’ennemi.

Les fumées des incendies déclarés un peu partout dans la ville sont repérées à cinq kilomètres par le détachement de la Division SS qui encercle la ville. Il leur faut une vingtaine de minutes pour reprendre Tulle. L'ennemi s’impose sans difficulté avec trois soldats tués et neuf blessés seulement. En revanche, les combats menés par les maquisards pendant ces deux jours ont fait 139 morts et une quarantaine de blessés côté allemand.

 

 

 

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© DR

 

 

 

A l’aube du 9 juin, les hommes de la Das Reich reçoivent l’ordre de perquisitionner les maisons, de recueillir les armes qui seraient cachées et de rassembler tous les hommes dans la cour de la manufacture pour vérification d’identité. A 10h, 3 000 hommes y sont parqués. Une déclaration des forces allemandes est placardée en ville : il y est question de l’assassinat de 40 soldats allemands pendant les deux jours de combat. Les corps mutilés auraient été retrouvés le matin même. Jusqu’à ce jour, cette information n’a jamais pu être vérifiée.


 
Il est stipulé dans cette déclaration que pour venger ces 40 tués, 120 maquisards et leurs complices seront pendus. En début d’après-midi beaucoup de Tullistes sont relâchés mais 400 sont encore retenus.


 
Et parmi eux, seuls deux maquisards ont été pris dans la rafle et les preuves de complicité contre les autres prisonniers n’existent pas… alors il faut trouver des motifs. Arbitrairement, les SS mettent de côté les jeunes, les mal rasés, tous ceux dont l’aspect semble négligé. Les premiers sont emmenés à l’extrémité sud de la ville. Entre 16h et 19h, 99 hommes sont pendus.



300 autres attendaient le même sort. Il en fut autrement : les SS décident de suspendre leurs représailles. Pourquoi ? Plusieurs hypothèses ont été avancées : l’abbé Lespinasse, qui avait accompagné chaque supplicié, aurait fait appel à leur clémence ; le secrétaire général de la Préfecture, qui parlait couramment allemand, serait parvenu à convaincre l’occupant de renoncer à sa vengeance.



Dans les jours suivants, 149 hommes de Tulle sont envoyés au camp de concentration de Dachau. 48 seulement en reviendront. En 48 heures, 213 civils seront tués à Tulle. Le 9 juin, la division Das Reich quitte Tulle et poursuit son périple pour rejoindre le front normand.

 

 

 

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© André Abalo - France 3 Limousin

 

 

 

#5 : Oradour-sur-Glane, l'atrocité

Le 10 juin 1944, à 14h, les habitants d'Oradour-sur-Glane voient arriver des soldats SS. Dans ce petit village de Haute-Vienne, on ignore presque tout de la guerre. Seuls ceux de 14 savent ce que sait vraiment. Avec une force presque tranquille, les soldats rassemblent la population sur le champ de foire. Les enfants sont avec leurs institutrices, les hommes bavardent. Il n'y a peut-être bien que les femmes pour se faire du mauvais sang. Des mitraillettes sont en place mais rien ne bouge vraiment. Les SS disent vouloir chercher des armes. A Oradour, il n'y en a pas. Pretexte avant l'horreur. Les femmes et les enfants sont rassemblés dans l'église. Ils mourront brûlés vifs. Les hommes seront éparpillés en plusieurs lieux de supplice. Seuls 5 hommes et une femme en réchapperont : Marguerite Rouffanche, Mathieu Borie, Clément Broussaudier, Jean-Marcel Darthout, Yvon Roby et Robert Hébras.

 

 

Le dernier d'Oradour...



Robert Hébras est aujourd'hui le seul survivant du massacre encore en vie. Agé de 93 ans, il a refait pour nous le chemin de sa maison à la grange Laudy. Il nous confie ses souvenirs, son émotion et partage une dernière fois avec nous, son devoir de mémoire. Conception : Franck Petit et André Abalo.



A découvrir sur 3NoA, à partir du 10 juin 2019, à l'occasion du 75e anniversaire du massacre d'Oradour-sur-Glane

 



10/06/2019
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