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L'AIR DU TEMPS

le Progrès du samedi 17 juin 2017

 

 
 
    VOSGES/CÔTE D'OR - NOUVELLES AVANCÉES DANS L'ENQUÊTE

 

 

 

AFFAIRE GRÉGORY : LE COUPLE DE SUSPECTS MIS EN EXAMEN

 

 

32 ans après la mort du petit Grégory : son grand-oncle et sa grand-tante, Marcel et Jacqueline Jacob, ont été mis en examen hier, à Dijon, pour enlèvement et séquestration suivis de mort, puis écroués.

 

 

■ Quoi de neuf ?

 

"Parmi les trois personnes qui avaient été placées en garde à vue, la présidente de la chambre d'instruction a levé, le 15 juin en fin de journée, la mesure qui concernait Madame Ginette Lecomte épouse Villemin", expliquait hier le procureur général de la cour d'appel de Dijon". "Le magistrat instructeur a fait déférer ce jour (hier), Madame Jacqueline Jacob et Marcel Jacob. Sur les réquisitions du parquet général, ils ont été mis en examen sous la qualification d'enlèvement et séquestration du mineur Grégory Villemin, suivi de la mort. La qualification retenue recouvre la réalisation d'un acte collectif".

 

 

 

■ Ce qu'il y a dans le dossier

 

Il y a évidemment ce que le procureur peut révéler et il y a le reste. Les faits certains, selon lui : "Le corbeau est constitué de deux personnes, un homme et une femme. Il s'est manifesté par des écrits et des appels téléphoniques. Il y a une concordance entre le contenu des appels et des écrits". Autre chose, l'analyse des écritures pointe du doigt Jacqueline Jacob pour une lettre manuscrite et l'incrimine également, bien que moins catégoriquement pour deux lettres typographiques. "Il y a des présomptions. La président de la chambre d'instruction (Madame Barrier) a considéré que ces présomptions justifiaient des mises en examen. Nous sommes dans les recherches. Et elles ne portent pas que sur le corbeau mais aussi sur d'autres éléments du dossier dont je ne peux pas parler". Des arguments insuffisants aux yeux des avocats du couple.

 

 

 

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■ La suite

 

Le couple Jacob est en détention provisoire "en partie pour éviter toute communication frauduleuse entre les deux protagonistes". Il appartiendra à la chambre d'instruction de statuer, dans les quatre jours, sur la prolongation de la détention provisoire ou sur le placement sous contrôle judiciaire de ces deux protagonistes.

 

 

 

■ Du côté des parents du petit Grégory

 

L'avocat qu a suivi le couple Villemin depuis le début de cette pénible affaire, Me Thierry Moser, joint par téléphone, parle du ressenti de ses clients. "C'est un mélange de satisfaction et de douleur intense. Christine et Jean-Marie Villemin sont heureux de voir que le boulot formidable de la gendarmerie et de la présidente Barrier aboutit. En même temps, ils sont catastrophés qu l'on reparle de la mort de leur enfant et aussi accablés de découvrir l'ampleur de la félonie dont ils sont victimes, de voir que des membres de leur famille se sont comportés de manière aussi abjecte".

 

 

Quant à savoir si c'est une surprise pour les parents de voir surgir des noms aussi proches d'eux, dans cet incroyable rebondissement de l'affaire : "Honnêtement non. Ce couple avait été évoqué dans nos conversations, entre nous". Pour la suite et le contenu du dossier qui a semblé un peu léger, hier, Me Moser est "confiant". "Le procureur n'a pas pu déflorer certains éléments et je ne le ferai pas non plus. Mais je suis serein et je crois que la chambre de l'instruction se prononcera en faveur d'un maintien en détention du couple Jacob". Amandine Robert

 

 

 

"À l'évidence, Grégory a été enlevé du domicile de ses parents et retenu un certain temps jusqu'à sa mort. [Les Jacob] ne présentent pas en l'état d'alibi qui soit confirmé ou étayé". Jean-Jacques Bosc, procureur général de Dijon

 

 

 

 

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À Aumontzey, dans les Vosges, les langues se délient

 

Les mises en examen d'hier n'ont pas sur tous les habitants d'Aumontzey, petite commune des Vosges où vivent la plupart des membres de la famille Villemin. Leurs proches abasourdis, refusent de croire à la culpabilité des Jacob. "Non, c'est pas lui, ils font erreur", soutient le frère de Marcel, René Jacob. Il décrit un homme effrayé par la mort et si respectueux de la loi que "si on lui dit de rouler à 50, il roule à 40".

 

 

Le même Marcel Jacob a été décrit par le procureur général de Dijon comme animé par "un antagonisme parfois violent avec les parents de Grégory". Le frère de Jacqueline Jacob, Daniel Thuriot, est également convaincu de leur innocence. "C'est pas eux. Je pense pas qu'ils aient fait des choses pareilles", a-t-il affirmé. "De toutes façons, c'est ma soeur et mon beau-frère.

 

 

 

"Enfin on marche vers la vérité"

 

Autmontzey est une nouvelle fois divisé par l'affaire Grégory. Certains, comme le maire, Philippe Petigenet (sans étiquette) doutent. "Ces mises en examen sur des bouts de papier, ça m'agace", dit-il. "Ces gens sont des gens bien, impliqués dans la commune. Ce que j'ai entendu au cours de la conférence de presse me paraît très léger. C'est une affaire qui fait mail et comme beaucoup d'administrés, j'en ai ras-le-bol". Mais tout le monde ne partage pas cet avis.

 

 

Une fois assurés de ne pas être identifiés, certains confient leurs idées sur ce drame. "Enfin on marche vers la vérité. On va savoir qui c'est", se réjouit un voisin des grands-parents de Grégory "Que la grand-mère soit dans le coup, ça ne m'étonne pas. Elle n'a jamais pu supporter la Christine (la mère de Grégory). Et ça m'étonne pas, parce que le juge était convaincu de l'innocence de Christine et elle, la grand-mère, elle voulait qu'il oriente son enquête vers la mère", explique-t-il. "Ça m'étonne pas qu'ils soient impliqués. Je l'ai toujours senti", assure pour sa part une voisine du couple Jacob. "Mais j'ai jamais rien voulu dire. Vous comprenez, ici tout le monde connait tout le monde". La peur de représailles, les pressions ont pesé sur cet affaire et amené des témoins à mentir, a souligné hier le procureur général en annonçant de nouvelles auditions très rapidement. Mais selon un notable du village, "ce n'est pas encore demain que les langues vont se délier entièrement".

 

 

 

 

 

ANACRIM : LE LOGICIEL QUI A RELANCÉ L'AFFAIRE

 

Anacrim, à l'origine de la relance de l'affaire Grégory, est un logiciel d'analyse criminelle qui traite toutes les données d'enquête pour en tirer des recoupements et de nouvelles hypothèses de travail, une aide pouvant s'avérer déterminante dans les "cold cases".

 

 

Conçu au milieu des années 1990 par la gendarmerie, Anacrim apporte un regard neuf à des enquêteurs, souvent noyés par des milliers de procès-verbaux et des données techniques complexes à traiter (téléphonie, comptes bancaires, multiplicité des auditions de témoins...).

 

 

À partir de toutes les données matérielles (lieux, modes opératoires, indices...) et humaines (suspects, témoins) toujours issues de la procédure judiciaire, cet outil permet d'effectuer des regroupements entre plusieurs affaires semblables, tester des hypothèses mais aussi de représenter visuellement l'enquête.

 

 

Il apporte "une vision globale de la procédure et permet de distinguer la logique qui se dessine au travers de la commission d'un fait criminel ou délictuel", explique le colonel Didier Berger, chef du Bureau des affaires criminelles de la gendarmerie.

 

 

 

 

"Un regard neuf"

 

L'objectif du logiciel : mettre en évidence des incohérences d'emploi du temps d'un témoin ou d'une personne mise en cause, des contradictions entre certains témoignages et des constatations effectuées par les enquêteurs.

 

 

Anacrim "a relancé l'enquête sur la mort du petit Grégory en offrant un regard neuf sur la procédure car, sur le fond, il n'y a pas d'éléments nouveaux", a expliqué une source proche du dossier. "Comme les investigations récentes de police technique et scientifique sur les dizaines de scellés n'ont pu aboutir, les gendarmes ont décidé une remise à plat du dossier et Anacrim, sous sa dernière version, a permis de démontrer de nouvelles incohérences qui avaient jusque-là échappé aux enquêteurs", a-t-elle ajouté.

 

 

Le Service central du renseignement criminel de la gendarmerie a ainsi reconstitué la chronologie des jours précédant et suivant le crime, de faon à positionner, dans l'espace et dans le temps, l'ensemble des protagonistes et des éléments considérés comme intéressants.

 

 

Après ce minutieux travail de relecture et d'analyse, trois membres de la familles Villemin, ont été placés en garde à vue à Dijon, interrogés et mis face à leurs contractions.

 

 

Anacrim permet notamment de "préparer des stratégies d'audition de témoins" et surtout "de ne pas passer à côté d'une piste", estime le colonel Berger.

 

 

Anacrim a notamment aidé les gendarmes à prouver l'implication du tueur Michel Fourniret dans des faits qui ne lui étaient pas imputés jusqu'alors. Il a aussi aidé à arrêter Émile Louis dans l'enquête sur les disparues de l'Yonne.

 

 

"Il est devenu un outil indispensable pour toutes les procédures complexes ou sensibles. Le cerveau humain a ses limites et n'est pas toujours capable d'analyser des faits parfois anodins. Toutefois, Anacrim reste une aide. Il ne fait qu'orienter les soupçons", conclut M. Berger.

 



17/06/2017
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